Docteurs honoris causa

2023 - Pierre Tercier

Laudatio de M. Pierre Tercier, Dr h. c., Dies Academicus 2023

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Cher Professeur Tercier,

Fondamentalement, vous êtes littéraire, m’avez-vous confié. Vous aimez les mots, vous lisez beaucoup. Et si vous avez choisi le droit, c’est parce qu’à vos yeux, c’est aussi de la littérature. Ce sont les mots en action.

Les mots, comme professeur et orateur, vous en avez joué consciemment devant votre public et, en tant que chercheur, vous en avez mis beaucoup sur le papier.

C’est par un baccalauréat latin-grec au Collègue St-Michel à Fribourg qu’a débuté votre parcours. Puis, ce furent la licence en droit, le brevet d'avocat et le doctorat dans cette même ville dont vous dites qu’elle a été votre ancrage. Elle a été votre port d’attache, comme étudiant puis comme Professeur, alors que vous avez voyagé à Hambourg, puis Cambridge, puis Paris – où vous avez aussi enseigné et que vous appelez votre deuxième cité –, puis dans d’autres lieux encore.

L’enseignement, la recherche, l’arbitrage sont les trois activités phares qui vous ont occupé. Votre carrière, m’avez-vous dit, a fondamentalement été une carrière d’enseignant, que vous avez vécue comme un cadeau. Pour le contact avec les jeunes, mais aussi parce que vous aimez enseigner, expliquer, faire connaître. Ce cadeau, vous continuez à le faire vivre en cultivant des liens scientifiques et amicaux avec vos doctorantes et doctorants.

Expliquer clairement, c’est aussi ce qui a animé votre travail de chercheur. Vos publications, dans lesquelles vous avez touché tous les aspects du droit, ont ainsi été marquées par un sens de la synthèse qui a imprégné plusieurs générations de juristes de Suisse romande et au-delà. Je citerai notamment « La recherche et la rédaction juridique », « La responsabilité civile », « La partie générale du droit des obligations », « Les contrats spéciaux », « Le droit de la personnalité ». Plusieurs ouvrages continuent leur vie avec l’aide de successeurs, tandis que d’autres ont disparu prématurément, ce qui vous a un peu attristé. Dans un monde juridique toujours plus spécialisé, dans une vie aux 24 heures limitées, ce destin est compréhensible.

Car dans vos journées, il y a aussi eu vos fonctions auprès de la Commission suisse de la concurrence, les nombreuses semaines au service militaire jusqu’au grade de lieutenant-colonel, les avis de droit et, enfin, l’arbitrage commercial, où vous êtes encore très actif, et que vous aimez beaucoup. Dans cette mise en pratique du droit, on peut voir si ce qu’on a enseigné fonctionne ou non, et pourquoi. On y rencontre des gens de tous milieux – la rencontre, vous en avez toujours eu besoin. Et on y trouve des affaires extrêmement intéressantes et variées – de quoi satisfaire votre grande curiosité. Dans toutes ces activités, on vous connaît aussi un petit côté « colonel » que vous assumez.

Envers les anciens de notre Faculté, en particulier Jean-François Aubert, Jacques-Michel Grossen et Pierre Wessner, vous avez une profonde admiration. Vous avez aussi inspiré et participé à la première édition du Séminaire du droit du bail, fleuron de notre Faculté. Et aujourd’hui, vous entretenez des liens avec la nouvelle génération de Neuchâtel.

En jetant un coup d’oeil dans le rétroviseur, vous m’avez dit : « Je trouve que, comme profs, on a été trop sages. On n’a pas assez rué dans les brancards, avec ce qui n’allait pas. Le rôle du professeur n’est pas seulement de transmettre ce qui existe, mais aussi de le remettre en cause. Et je ne suis pas sûr qu’on l’ait toujours joué suffisamment. On était sages. » Auprès de cette jeune génération, je transmets le message !

Vous aimez les mots, vous aimez la musique aussi. Vous connaissez Brassens par coeur. Et vous adorez les arbres. Leur beauté. Leurs couleurs. Leur manière de vivre et de se renouveler. Le service qu’ils rendent dans les échanges. Auprès de votre arbre, je vous souhaite de vivre et de poursuivre heureux.

Un diplôme va maintenant vous être remis par notre recteur. On y lit :

L'Université de Neuchâtel, sur proposition de sa Faculté de droit, confère par les présentes, à Monsieur Pierre Tercier, Professeur émérite de l’Université de Fribourg, Président honoraire de la Cour internationale d’arbitrage de la Chambre de commerce internationale à Paris, pour son rôle de pionnier dans le développement d'une didactique et d'une méthodologie juridiques suisses et pour sa contribution extraordinaire au développement et à la visibilité internationale du droit privé suisse, le grade de docteur en droit honoris causa.

Texte rédigé et prononcé le 4 novembre 2023 lors du Dies academicus

par Valérie Défago, doyenne

2022 - Ruth Dreifuss

Laudatio de Mme Ruth Dreifuss, Dr h. c., Dies Academicus 2022

Née durant la Seconde Guerre mondiale à Saint-Gall, Mme Ruth Dreifuss a, après avoir obtenu une licence en sciences économiques à l'Université de Genève, connu un parcours de vie, professionnel et politique peu banal – pour dire le moins – qui l'a conduite à découvrir et traverser aussi bien les diverses régions du pays et du monde, que différentes disciplines et expériences professionnelles.

Tour à tour journaliste, assistante à l'Université, puis adjointe scientifique au sein de la Direction de la coopération et de l'aide humanitaire du Département fédéral des affaires étrangères, elle devient, en 1981, secrétaire de l'Union syndicale suisse et s'engage alors dans les domaines du droit du travail et du droit de la sécurité sociale, deux domaines chers à la Faculté de droit de Neuchâtel, au travers notamment de son Centre d'étude des relations de travail, le CERT, et de l'Institut de droit de la santé.

Les médias et autres personnes la connaissant la décrivent comme une force tranquille, tenace, voire opiniâtre, visionnaire, prudente, cérébrale, réaliste, rigoureuse, engagée, parfois isolée, discrète mais aussi populaire, singulière mais aussi plurielle, et j’en passe.

Ce sont probablement tous ces qualificatifs qui ont fait que, le 10 mars 1993, Mme Ruth Dreifuss est élue Conseillère fédérale par l’Assemblée fédérale.

Elle est la deuxième femme, seulement, à revêtir cette fonction, le 1er avril 1993.

Elle sera, en 1999, la première femme, dans l’Histoire, à accéder à la Présidence de la Confédération.

Durant toute sa période au sein du Gouvernement fédéral, où elle restera jusqu’au 31 décembre 2002, Mme Ruth Dreifuss sera en charge du Département fédéral de l’intérieur, c’est-à-dire cumulera les tâches qui relèveraient, dans d’autres pays, des Ministres ou des Ministères de la santé, de la sécurité sociale, de l’égalité entre femmes et hommes, de la culture, pour n’en citer que quelques-uns.

Mme Dreifuss s’engage alors pleinement et avec conviction dans ces fonctions, afin de faire tomber certains tabous de la politique suisse, comme celui de l’obligation d’assurance dans le domaine de l’assurance-maladie ou encore celui de l’impossible mise en place d’une assurance-maternité digne de ce nom, mandat constitutionnel jusque-là toujours resté inaccompli depuis 1945.

On doit notamment à Mme Dreifuss, entre autres, diverses réformes importantes en matière d’assurances sociales, comme l’adoption en 1994 de la LAMal, la loi sur l’assurance-maladie, mais aussi de la 10ème révision de l’AVS, qui introduit le système du splitting, en 1995, à chaque fois au terme d’une votation populaire où il lui a fallu convaincre l’opinion publique. L’assurance-maternité, quant à elle, après un rejet en votation populaire en 1999, a enfin été introduite en 2003, peu après le retrait de Mme Dreifuss du Conseil fédéral, mais celle-ci s’est à nouveau fortement engagée pour soutenir le projet, soumis encore une fois à votation populaire, en septembre 2004.

On doit aussi à Mme Ruth Dreifuss, comme cheffe du Département fédéral de l’intérieur, et « ministre » de la santé publique, une réforme fondamentale de la politique suisse de la drogue, fondée sur le principe des quatre piliers que sont la prévention, la thérapie, l’aide à la survie et la répression.

Enfin, et sans prétention à l’exhaustivité, c’est également sous la direction de Mme la Conseillère fédérale Ruth Dreifuss et de son Département qu’a vu le jour, en mars 1995, la loi fédérale sur l’égalité entre femmes et hommes, qui devait, près de 15 ans après le mandat constitutionnel relatif à cette égalité, concrétiser ce mandat et renforcer les moyens permettant de parvenir à une réelle égalité entre les femmes et les hommes, notamment dans le monde professionnel.

Retraitée du Conseil fédéral dès 2003, Mme Ruth Dreifuss n’en a pas moins continué à s’engager, activement et toujours avec la même conviction, pour les causes qui lui tenaient et lui tiennent à cœur. Ces causes peuvent être synthétisées en quatre domaines :

  • L’accès aux soins, tout d’abord, au sens large, l'accès aux médicaments, vaccins, diagnostics et autres dispositifs médicaux : Mme Ruth Dreifuss a présidé la Commission sur les droits de propriété intellectuelle, l’innovation et la santé publique instituée par l’OMS (avec un rapport de 2006), puis elle a assumé la co-présidence du Groupe de haut niveau sur l’accès aux médicaments mandaté par le Secrétaire général de l’ONU (avec un rapport de septembre 2016).
  • L’abolition de la peine de mort, ensuite : Mme Ruth Dreifuss s’est engagée depuis des décennies dans ce combat, comme membre d’Amnesty International, vice-présidente de la Commission internationale contre la peine de mort, depuis la création de celle-ci, peu après son retrait du Conseil fédéral.
  • Les réformes, en troisième lieu, des politiques en matière de stupéfiants, à la fois sur le plan cantonal genevois (comme présidente de la Commission consultative en matière d’addiction, de 2014 jusqu’à fin 2021, et, depuis 2022, comme présidente de l’association responsable de l’essai pilote de vente de cannabis récréatif genevois) mais aussi au plan international (Mme Dreifuss est membre fondateur de l’ONG « Commission globale de politiques en matière de drogues », créée en 2011, et qu’elle a présidée de 2016 à 2020).
  • Enfin, le domaine de la politique suisse de la migration et de l’asile, domaine dans lequel les engagements de Mme Ruth Dreifuss sont nombreux et variés : elle a notamment participé activement aux campagnes de votations sur l’Accord sur la libre circulation des personnes avec l’Union européenne et ses États membres mais aussi d’autres votations populaires fédérales, tout comme elle participe activement à des projets innovants sur un plan plus local, comme le projet Papyrus à Genève, par exemple.

Dans ces divers engagements, tant en sa qualité de cheffe du Département fédéral de l’intérieur que dans ses activités ultérieures, ses engagements plus récents, Mme Ruth Dreifuss a toujours entretenu des relations étroites et privilégiées avec la Faculté de droit de l’Université de Neuchâtel, certains de ses centres de compétence, comme l’Institut de droit de la santé, et certains de ses professeur.e.s, en matière de droit de la sécurité sociale, de droit du travail, d’égalité entre femmes et hommes et d’interdiction des discriminations, mais aussi, tout particulièrement, en matière de droit de la santé et de politique de la drogue (dépénalisation, « Drug Checking », etc.). À ce propos, tout récemment, à l’occasion d’une décision de la Commission de la sécurité sociale et de la santé publique du Conseil des états concernant la levée de l’interdiction du cannabis, il a été souligné dans les médias qu’il est [je cite] « rare que les ministres aient trente ans d’avance sur leur opinion publique ».

Ce sont à ces qualités-là, d’anticipation, de conviction et de courage, que la Faculté de droit entend aujourd’hui rendre hommage.

La Faculté de droit note du reste que plusieurs des principaux domaines dans lesquels Mme Dreifuss a concentré ses nombreux et divers engagements depuis son retrait du Conseil fédéral correspondent à des domaines phares de l’Université de Neuchâtel, que celle-ci et sa Faculté de droit ont mis en avant au cours des dernières années, notamment dans ses plans d’intentions successifs, comme le droit des migrations et de l’asile, mais aussi le droit de la santé et de l’accès aux soins et aux médicaments, ainsi que droit de la propriété intellectuelle et de l’innovation.

La Faculté de droit est donc aujourd’hui très heureuse de voir conférer à Mme Ruth Dreifuss le titre de docteure honoris causa « pour ses engagements sans faille dans les domaines du droit de la santé et de la sécurité sociale, du droit des migrations, de l’égalité et de la lutte contre les discriminations ».

Prof. Olivier Hari, Doyen de la Faculté de droit

Rédigé par Pascal Mahon, professeur émérite de droit constitutionnel suisse et comparé et André Kuhn, professeur de droit pénal et de criminologie

2021 - Malgosia Fitzmaurice

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Laudatio de Mme Malgosia Fitzmaurice, Dr h.c. Dies academicus 2021

La Faculté de droit de l’Université de Neuchâtel a le très grand honneur et plaisir de célébrer la carrière académique de Madame la Professeure Malgosia Fitzmaurice, à laquelle elle a choisi d’attribuer le titre de Dr. honoris causa cette année.

Synthétiser son parcours n’est pas chose aisée.

Ses principaux domaines d'intérêt sont le droit des traités, le droit international des espaces et le droit international de l'environnement, avec un accent tout particulier sur la protection de l'environnement marin et de la biodiversité, la réglementation de la chasse aux baleines, la protection environnementale de la mer Baltique, ainsi que les droits des peuples autochtones, domaine dans lequel elle est une pionnière.

Professeure à la Queen Mary University à Londres, où elle enseigne le droit international public général, le droit des traités et le droit international de l'environnement depuis 1995, elle est également la Part-Time Nippon Foundation Professor of Marine Environment Protection à l'Institut de droit maritime international de l'Organisation Maritime Internationale et membre associée de l'Institut de Droit International.

Il s’agit de positions académiques et facultaires extrêmement prestigieuses, qui illustrent une très grande reconnaissance internationale plus que méritée !

La Professeure Fitzmaurice a commencé sa carrière comme chercheuse à La Haye, puis a rapidement mis ses connaissances en pratique en tant qu’assistante juridique au Tribunal des réclamations Iran-États-Unis créé suite à la crise des otages de 1979 entre ces deux pays.

Elle a été la première femme à obtenir la bourse du Conseil des Sciences des Pays-Bas, pour un projet de recherche sur la protection de l'environnement de la mer Baltique. En a résulté sa première monographie après sa thèse de doctorat rédigée en Pologne sur la prise de décision au sein des organisations internationales. Elle est passée ensuite par Amsterdam avant de rejoindre King’s College à Londres où, en 1992, notre professeur de droit de l’innovation Daniel Kraus, alors jeune étudiant, a été impressionné par son savoir et sa pédagogie fondée sur la discussion, en cercle, d’égal à égal entre la professeure, ses étudiantes et ses étudiants. Malgosia Fitzmaurice a également collaboré avec les universités de Berkeley, Paris 1 Sorbonne, Kobe, Varsovie et Wroclaw.

Ses travaux de recherche font référence et ont abouti en de nombreux ouvrages et articles de référence. Elle a aussi une intense activité de co-rédaction et de co-édition

Dans ses recherches, elle tisse des liens entre des branches comme le droit des traités et de la responsabilité étatique. Elle va même au-delà en établissant les relations entre la science et le droit, constatant que des conflits de valeurs peuvent mener à des conflits de normes. Malgosia Fitzmaurice comble ainsi des lacunes et réussit ce que peu de juristes arrivent à faire : atteindre un public qui va des spécialistes d’un domaine pointu jusqu’à des pêcheurs de baleines. Ce n’est pas pour rien que le British Yearbook of International Law a loué ses travaux en la qualifiant de « Thought-provoking ».

Madame la Professeure Fitzmaurice est également rédactrice en chef d'une série d’ouvrages de référence intitulée "Queen Mary Studies in International Law", rédactrice en chef de l'International Community Law Review, membre de la Commission du droit de l'environnement de l'Union internationale pour la conservation de la nature et membre du groupe de travail de l'Association de droit international sur l'interprétation des traités. Et ce ne sont que ses mandats les plus éminents.

Relevons finalement ses liens avec l’Université de Neuchâtel, dont elle a publié un, et bientôt deux ouvrages d’un de ses professeurs. Elle a aussi accueilli pour un séjour de recherche une doctorante dont la thèse sur l’exploitation des ressources génétiques marines hors juridiction nationale a fait date.

Au vu de tous ces accomplissements, notre recteur va lui remettre un doctorat honoris causa où il est écrit ceci :

« L’Université de Neuchâtel sur proposition de sa Faculté de droit confère par les présentes à Madame Malgosia Fitzmaurice, Professeure de droit public international,

Département de droit, Queen Mary University, Londres

pour ses accomplissements académiques en tant que professeure de droit et son rôle de pionnière dans l’avancement du droit des traités, du droit de l'environnement et du droit des populations indigènes,

Le grade de docteure en droit honoris causa. »
 

Neuchâtel, le 6 novembre 2021

Olivier Hari

Doyen et Professeur à la Faculté de droit

2020 - Jane C. Ginsburg

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Pionnière dans l’avancement de la recherche dans le droit de la propriété intellectuelle, Mme Jane Ginsburg est une sommité dans son domaine. Diplômée de l’Université de Chicago et de la Harvard Law School, elle est titulaire d’un doctorat en droit l'Université Panthéon-Assas de Paris. Elle a été, après ses études, adjointe au juge à la Cour d'appel des États-Unis pour le troisième circuit (Pennsylvanie, Delaware, New Jersey). Jane Ginsburg a travaillé pour l’American Law Institute et conseillé non seulement le gouvernement américain, mais aussi de nombreux autres États, autant dans des pays industrialisés qu’en développement.

Laudatio de Mme Jane C. Ginsburg, Dr h.c. Dies Academicus 2020

Madame Jane C. Ginsburg est une pionnière dans l'étude de la propriété intellectuelle, une scientifique mondialement renommée, et une professeure très appréciée aussi bien par ses étudiantes et étudiants que par ses pairs.

Elle est professeure de droit de la propriété littéraire et artistique de la chaire Morton L. Janklow et directrice du Kernochan Center for Law, Media and the Arts de l'Université de Columbia. Elle y enseigne la méthodologie juridique, le droit d'autrice et d’auteur américain et international ainsi que le droit des marques.

Elle a tracé sa propre voie jusqu'au sommet du monde académique.

Pour ce faire, elle a pu s'appuyer sur de solides études à l'Université de Chicago et à Harvard, où elle a obtenu le grade de Juris Doctor en 1980. Elle a poursuivi ses études à l'Université parisienne Panthéon Assas, au bénéfice de la prestigieuse bourse Fulbright. Elle a obtenu à Paris le Diplôme d'études approfondies en 1985 (D.E.A.) et son doctorat en 1995.

Jane C. Ginsburg a ensuite acquis une expérience inégalée comme greffière de la cour d’appel des Etats-Unis pour le juge fédéral Gibbons, puis dans une étude d'avocats de New York. Elle a rejoint l’Université de Columbia comme professeure associée puis titulaire, devenant une référence aux États-Unis et au niveau international.

La reconnaissance est venue naturellement, et a crû tout aussi rapidement.

Sans prétendre à l’exhaustivité, vu l’étendue de ses activités, nous mentionnerons qu'elle a été professeure à l'Université de Cambridge, titulaire de la chaire de sciences juridiques Arthur L. Goodhart et professeure à l’Emmanuel College. À la fin des années nonante, elle a été invitée par l'Académie de droit international de La Haye pour un cours visionnaire intitulé Law of Copyright in an Era of Technological Change.

Elle a aussi accompli un tour du monde académique la conduisant dans le désordre à Nantes, Toulouse, Paris, Cambridge, La Haye, New-York, Melbourne, Helsinki, Rome, Sydney, Jérusalem, Auckland ou encore Papeete.

Jane C. Ginsburg est l’autrice et la co-autrice de manuels de référence en droit de la propriété intellectuelle, en droit des marques, en droit d’autrice ou d’auteur et en méthodologie juridique. Elle a également publié de nombreux articles et chapitres de livres sur le droit national et international de la protection du droit d'autrice ou d’auteur et des marques.

Au sein de l'American Law Institute, elle a été co-rapporteure pour une étude sur les « Principes régissant la juridiction, l’élection de droit et les jugements dans les litiges transnationaux de propriété intellectuelle ». Elle est par ailleurs “Corresponding Fellow” de la British Academy, membre de l'American Philosophical Society, membre de l'American Academy of Arts and Sciences, membre honoraire de l'Emmanuel College de l’Université de Cambridge, et elle a été membre affiliée et résidente de l'American Academy à Rome. Jane C. Ginsburg est aussi vice-présidente de l’Association Littéraire et Artistique Internationale, dont le siège est à Paris et le but est de promouvoir et défendre les droits des autrices et des auteurs ; elle préside la section américaine.

En 2008, Jane C. Ginsburg a été intronisée au panthéon de la propriété intellectuelle en étant élue IP Hall of Fame inductee, décrite comme « A highly influential academic and teacher who has written some of the most important IP-related books of modern times », une phrase qui résume bien ses grandes qualités.

Elle s’est vu remettre en 2015 la prestigieuse distinction Mark T. Banner de la section de la propriété intellectuelle de l'American Bar Association.

Outre l'anglais, elle parle à la perfection l'espagnol, l'italien et le français. Sa maîtrise des langues a ainsi facilité ses nombreux voyages dans notre pays où elle s’est prise d’affection pour la culture romande.

Nous espérons qu'elle continuera à visiter aussi souvent que possible la Suisse dans les années à venir.

Madame Jane C. Ginsburg va à présent recevoir des mains de Mme Nathalie Tissot, vice-rectrice un diplôme sur lequel figurent les mots suivants :

(Texte du diplôme)

L'Université de Neuchâtel, sur proposition de sa Faculté de droit, confère par les présentes à Madame Jane C. Ginsburg, professeure de droit de la propriété littéraire et artistique, Columbia Law School.

Pour ses accomplissements académiques exceptionnels en tant que professeure de droit et son rôle de pionnière, mondialement reconnu, dans la recherche concernant le droit de la propriété intellectuelle,

le grade de docteure en droit honoris causa.

 

Olivier Hari,
Doyen et Professeur en Faculté de Droit

 

Neuchâtel, le 5 novembre 2021

Présentation vidéo

Dies academicus 2020

Années précédentes

  • 2019 - Annie Rochat Pauchard

     

    Licenciée en droit de l’UniNE, Annie Rochat Pauchard entame une carrière de juriste au sein de l’Administration fédérale des contributions. Elle participe dès 1993 aux travaux de mise en place de la TVA. En 1994, elle entre au service des Commissions fédérales de recours du Département fédéral des finances. En 2003, elle devient juriste fiscaliste dans divers cabinets spécialisés. Dès 2011, elle retrouve l’administration fédérale où elle dirige la Division Droit de la Division principale de la TVA et devient ainsi la première femme nommée à la tête d’une telle unité. Elle participe activement à la mise en œuvre de la nouvelle loi sur la TVA et à sa révision en 2018. En 2017, elle est élue juge à la Cour I du Tribunal administratif fédéral et occupe, depuis 2018, la fonction de vice-présidente de la chambre 2.

    Laudatio de Mme Annie Rochat Pauchard, Dr h. c. Dies Academicus 2019

     

    Chère Madame Rochat Pauchard,

    Vous m’avez raconté que c’était parce que Neuchâtel disposait d’une université publique accessible à tous que vous aviez pu faire des études supérieures. J’ai été enchanté de l’entendre. Depuis, vous êtes devenue la spécialiste de la TVA suisse. Quel parcours ! Au fil du temps, vous avez travaillé aux questions juridiques soulevées par la mise en place de cette taxe tant du côté administratif, que privé et judiciaire. Aujourd’hui, je suis très heureux et honoré de pouvoir vous adresser cette laudatio.

    Née aux Canaries, vous déménagez au Landeron à l’âge de huit ans. Vous débutez vos études à Neuchâtel, jusqu’à une maturité latin-langues, puis optez pour le droit à l’Université. La matière vous plaît, vous avez trouvé votre voie.

    En 1991, une annonce retient votre attention : « Si vous avez de l’intérêt pour le droit des obligations, ce poste est pour vous », énonce en substance le texte. Au téléphone, Monsieur Pascal Mollard vous informe que l’emploi concerne en fait « l’impôt sur le chiffre d’affaires ». « Pardon ? », demandez-vous. « Si si, c’est très intéressant ! Détrompez-vous, on fait beaucoup de droit des obligations. »

    Vous voilà donc engagée dans le droit fiscal comme juriste au sein de l’Administration fédérale des contributions, à Berne, où vous participez aux travaux législatifs de la TVA, adoptée en novembre 1993. Vous rédigez notamment la version française de l’Ordonnance fondée sur ce texte.

    En 1994, vous passez à l’instance supérieure comme secrétaire-juriste. Vous vous rendez à Lausanne, afin de mettre sur pied les Commissions fédérales de recours du Département fédéral des finances. C’est à nouveau un travail de pionnière, cette fois au niveau de l’activité judiciaire en matière de TVA.

    En 2003, vous faites un saut quantique et commencez à exercer en tant qu’avocate fiscaliste dans des cabinets spécialisés à Genève et à Lausanne où vous élargissez considérablement votre vision de la matière. En juillet 2010, vous concrétisez votre activité de praticienne dans le secteur privé en obtenant votre brevet d'avocat.

    En 2011, un nouveau carrefour se présente : Monsieur Gabriel Rumo, chef de la Division principale de la TVA, vous propose d’en diriger la Division Droit à Berne. Vous retrouvez ainsi l’administration fédérale et devenez la première femme nommée à la tête d’une telle unité. Vous participez activement à la mise en œuvre de la nouvelle LTVA et à sa révision, qui aboutira en 2018.

    En 2017, c’est une autre porte qui s’ouvre, vers le Tribunal administratif fédéral cette fois. Vous êtes élue juge à la Cour I du TAF à St-Gall, où vous occupez, depuis octobre 2018, la fonction de vice-présidente de la chambre 2. C’est un nouvel aboutissement.

    En tant qu’éclaireuse dans le domaine de la TVA, vous avez en outre été amenée à donner tôt des conférences sur le sujet, participant ainsi au débat scientifique. L’an dernier, c’est à la 9ème Assemblée de l'International Association of Tax Judges à Ottawa que vous avez été invitée à vous exprimer. Vous avez également rédigé des publications en allemand et en français. Je mentionnerai ici le volumineux « Droit fiscal suisse. La taxe sur la valeur ajoutée », paru en 2000 et co-écrit avec le Prof. Jean-Marc Rivier. Depuis 1997 déjà, vous collaborez en outre à la Revue de droit administratif et fiscal (RDAF) et, depuis fin 2017, vous êtes membre du comité de rédaction de la Revue des juges "Justice - Justiz - Giustizia".

    Enfin, vous aimez enseigner. Sur ce plan, je me réjouis tout particulièrement de la collaboration initiée cette année qui permettra à nos étudiants de Bachelor de bénéficier de vos connaissances en matière de TVA. Il faut dire que vous avez gardé de forts liens avec celle que vous appelez « votre Université ». Eh bien, Madame Rochat Pauchard, votre Université vous félicite aujourd’hui pour votre brillant parcours.

    Veuillez ainsi recevoir des mains de notre recteur ce doctorat honoris causa, qui comprend la mention suivante :

    L’Université de Neuchâtel, sur proposition de la Faculté de droit, confère par les présentes à Madame Annie Rochat Pauchard, Juge au Tribunal administratif fédéral,

    Pour son parcours de pionnière, ses accomplissements remarquables et sa connaissance hors norme du droit suisse de la TVA, tant dans la magistrature que dans l’administration et le secteur privé,

    le grade de docteure en droit honoris causa.

    Prof. Blaise Carron, doyen de la Faculté de droit

    Neuchâtel, le 2 novembre 2019

  • 2018 - Allan Rosas