La condition de réfugié résulte de la rupture du lien de citoyenneté entre une personne et un état. Dans Les Origines du Totalitarisme, la philosophe Hannah Arendt soutient que cette rupture ne peut être que totale et définitive. Le réfugié, mis au ban de toute communauté, se trouve à la fois privé du « droit d’avoir des droits » et condamné à vivre dans la « nudité abstraite de n’être plus qu’humain ». Dans les faits, si le refuge se traduit le plus souvent par une privation durable voire permanente de tout droit à la participation politique, tant dans le pays ayant provoqué l’exil que dans celui ayant accordé l’asile, il est parfois un régime transitoire ouvrant rapidement la voie au recouvrement de la citoyenneté. Au regard des variations considérables entre les situations de refuge, l’affirmation d’Arendt devient le point de départ de notre questionnement. A partir des outils de la science politique et au croisement des études de migrations forcées et de citoyenneté, notre projet explore deux possibles chemins vers la citoyenneté : Par la création d’un nouveau lien politique avec le pays d’asile d’une part, par la restauration du lien politique passé avec le pays d’origine d’autre part. Nous postulons que l’accès à a citoyenneté est façonné de manière décisive par les actions et les interactions entre des acteurs impliqués dans ce que Peter Gatrell a appelé le « monde du refuge », comprenant les états d’origine, les états d’asile, les organisations internationales et les réfugiés eux-mêmes. Au travers d’analyses comparatives de cas inclusifs et exclusifs issus de contextes politiques et historiques radicalement différents, notre projet vise à documenter et expliquer les différences d’accès aux droits politiques entre les situations de refuge.