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Francisco Córdova y López

 

Le Salut du Peuple

Ou la République démocratique fédérale

 

Madrid, 1871

 

Version originale

Version pdf

 

Présenté par Hernán Rodríguez Vargas

Traduit par Alexandre Frondizi

 


Présentation

L’auteur de La Salvación del pueblo o la República Democrática Federal, texte qui conserve de rares traces de la forme traditionnelle du catéchisme par question et réponse, est Francisco Córdova y López, un journaliste et homme politique qui participe constamment aux activités du Parti fédéral, fondé par Francisco Pi y Margall et Emilio Castelar au sortir de la révolution de septembre 1868, et qui devient l’une des figures principales de l’insurrection fédéraliste de septembre-octobre 1869 dont il dirige le Bulletin révolutionnaire. C’est alors que la rencontre de Giuseppe Fanelli, envoyé de Bakounine en Espagne, enrichit son républicanisme fédéraliste d’un socialisme libertaire internationaliste fortement inspiré du théoricien russe.

L’activité éditoriale et politique de Córdova, déjà importante depuis quelques années, connaît son apogée pendant les premières années du Sexenio democrático (1868-1874), années qui précèdent la brève expérience de la république démocratique fédérale (proclamée le 8 juin 1873 et interrompue par le coup d’État du 3 janvier 1874) que le catéchisme appelle ici de ses vœux. À la publication, juste avant la révolution, de La conspiración republicana: proclamas de los meses de junio, julio y agosto de 1868 s’ajoutent rapidement la fondation et/ou la direction de La Revolución. Diario Republicano (1868-1869), de La Democracia Republicana. Diario Federal (1869-1870), du Huracán. Diario Republicano Federal del Pueblo (1869-1870) et du Tribunal del Pueblo, la collaboration au Combate, journal qui se distingue par ses attaques contre le roi Amédée Ier et contre son soutien le général Juan Prim (novembre-décembre 1870), et la publication en deux volumes des Proletarios. Novela filosófico-social (1870).

 

 

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La Ilustración republicana federal, n°1, 15 juin 1871

 

La Salvación del pueblo, simultanément publiée sous format de livre par l’éditeur madrilène Nicolás González, est ci-dessous traduite à partir de la version parue, entre le 25 juin et le 23 juillet 1871, dans les numéros 2 à 6 de La Ilustración republicana federal, un hebdomadaire dirigé par Enrique Rodríguez-Solís, futur traducteur du Manuel républicain de Jules Barni. Comme l’indiquent limpidement son titre, son en-tête ou la couverture de son premier numéro – allégorie républicaine portant bonnet phrygien et drapeau tricolore avec la devise liberté-égalité-fraternité ; dédicace au peuple espagnol ; noms des martyrs républicains espagnols ; etc. –, cette revue illustrée milite en faveur d’une république démocratique et fédérale qui doit accomplir les promesses émancipatrices du message évangélique. Elle n’hésite pas non plus à défendre la mémoire de la Commune, à vanter les mérites des sociétés coopératives et de l’Association internationale des travailleurs ou à réclamer l’abolition de l’esclavage, encore très important dans la colonie cubaine.

Le catéchisme de Córdova se divise en neuf sections qui peuvent être regroupées en deux moments. Dans le second, assez bref, l’auteur se limite à demander l’adoption d’une déclaration des droits de l’homme, d’une Constitution démocratique, républicaine et fédérale espagnole et d’un plan de réformes sociales qu’il avait lui-même proposé deux ans auparavant. Le premier moment, bien plus long et intéressant, se compose de sept sections successivement consacrées à l’homme et à ses droits naturels, à la famille, à la commune, à la province, au canton et, enfin, à la fédération espagnole. Cette succession définit à elle-seule la république comme un harmonieux emboîtement d’associations libres et spontanées qui respectent toutes absolument l’autonomie inviolable de leurs membres et, in fine, les facultés et droits naturels de l’être humain, “principe de toute personne collective”. C’est ce respect constant et obligatoire qui élève la république démocratique et fédérale en seule forme légitime de gouvernement des hommes. Un autogouvernement fondé sur une anthropologie philosophique selon laquelle, puisque “le bien est la raison ou la matière du destin de l’homme”, les institutions et les lois doivent non pas surveiller ou réprimer, mais se mettre au service du destin naturel des êtres humains.

 


Document

 

Car on ne peut détruire un Dogme que par un Dogme. Et, quelque voie que vous adoptiez pour sortir des vieux dogmes, vous ne les détruirez qu’à la condition de les accomplir, c’est-à-dire de les dépasser par un dogme nouveau.

François Cantagrel [1]

 

I. L’Homme

L’homme, synthèse des perfections disséminées par la création, est un ensemble de facultés intellectuelles, physiques et morales destinées à la réalisation du bien contenu dans sa propre nature.

L’homme est le plus parfait des êtres créés. Être harmonieux ou synthétique de l’univers, il forme en raison de sa constitution privilégiée un ordre séparé des autres règnes naturels, un ordre supérieur à celui des espèces zoologiques, le règne hominal. La psychologie, pour ce qui est de l’esprit, et la physiologie, pour ce qui relève du corps, ont montré que l’homme se distingue spirituellement de l’animal puisque, tandis que le second ne peut franchir les barrières du fini ou du limité, le premier peut s’élever à un principe général, infini ou absolu. Au niveau physiologique, tandis que la caractéristique distinctive de l’animal réside dans la prédominance d’un système ou d’un organe et, donc, dans la disproportion, celle de l’homme est la proportion entre ses parties, l’harmonie physique. Spirituellement et physiquement harmonieux, il est destiné à établir l’ordre et l’harmonie dans les relations propres à la vie. Il est, en un mot, le microcosme dans lequel se reflète en petit l’univers tout entier.

Comme le minéral, le végétal et l’animal, l’homme se voit d’emblée graver sa loi par la nature. Il a également une fin assignée dans la vie dont résulte son bien-être individuel qui, agrégé à celui des autres hommes, provoque le bien-être collectif ou social.

Le bien est la raison ou la matière du destin de l’homme dont le droit et le devoir sont de le développer, en épanouissant librement ses facultés avec, comme seule limite, les droits correspondant aux facultés des autres hommes, ses frères dans l’association humaine. Dans le développement de ses facultés, l’homme rencontre-t-il des entraves aux facultés naturelles, des entraves aux droits des autres hommes, ses frères et associés ? Ces entraves, qu’elles proviennent de l’individu, de la famille, de la commune, de la province ou de l’État, forment un vrai attentat contre la nature humaine dont elles perturbent et invertissent le destin. Elles contaminent, pervertissent et dégradent la nature humaine. Le mal opéré par l’homme est alors de la seule responsabilité de l’individu, de la famille, de la commune, de la province ou de l’État, seuls vrais agresseurs de la nature humaine.

N’ayant qu’une seule nature humaine, il n’y a qu’une seule famille humaine : l’humanité. Tous les hommes sont égaux en facultés fondamentales : le sentiment, l’intelligence et la volonté. Le libre exercice et développement des facultés de l’homme doivent dès lors ne connaître pour limite que celle naturellement établie par l’exercice et le développement des facultés de l’homme, son semblable et, donc, son égal en liberté et en droits. En définitive, la loi de sa nature oblige l’homme à réaliser une fin inévitable, à savoir le bien, grâce à diverses facultés ou moyens naturels qui engendrent autant de droits et de libertés dérivant de leurs noms respectifs. Le contenu de la nature de l’homme étant le bien, l’homme est bon en soi. Il est, par le libre, parallèle et harmonieux épanouissement des facultés, susceptible d’une amélioration progressive et préalablement déterminée par son harmonieuse constitution.

Il convient désormais de se demander :

Comment, au lieu d’entraver, faciliter l’amélioration progressive de l’homme et, dès lors, de la société, puisque la seconde doit être une conséquence logique et naturelle du premier ?

Ou, en d’autres termes, termes plus clairs et précis :

Comment l’homme pourra-t-il accomplir au mieux sa loi naturelle et réaliser ainsi son destin individuel et social ?

 

II. Ses droits naturels ou individuels

Les droits naturels ou individuels correspondent aux divers moyens ou facultés dont la nature a préalablement doté l’homme afin de réaliser son bien individuel et social.

Si l’homme est doué de différentes facultés intellectuelles, physiques et morales qui forment son essence, son être et sa vie, si l’homme est doué d’intelligence pour penser, du cœur pour ressentir et de volonté pour exécuter ce qu’il ressent et pense, l’homme a le droit de vivre, penser, créer, choisir, travailler, se réunir et s’associer librement, selon sa détermination propre et spontanée. Si l’on restreint ou limite certains de ces droits, alors on mutile, violente, torture, aliène l’homme. Cette violence, cette torture et cette oppression sont un crime et, dès lors, la loi qui l’établit, l’autorise ou le concède, elle concède, autorise ou établit la loi du crime, de la tyrannie, de l’ignorance et de la misère.

Examinons les conséquences de cette organisation politique et sociale privilégiée. Elles démontreront de manière claire et évidente l’inviolabilité des droits naturels ou individuels et l’impossibilité de légiférer sur eux.

Tournez les yeux vers la place publique que vous laissez derrière vous. Observez. Un poteau s’élève d’une estrade surélevée par un escalier. Devant ce poteau se trouve un banc et, derrière lui, une manivelle reliée à une pince en fer. La foule, impatiente, lutte pour se frayer un chemin entre les forces d’infanterie et de cavalerie qui entourent le macabre échafaud. Arrive alors, assis sur un âne, un homme revêtu de la blouse et du bonnet des condamnés, sans conscience de lui-même ni de ce qui l’entoure, intellectuellement, physiquement et moralement anéanti et assiégé par les exhortations des prêtres et des frères de la Charité. Le son aigu du clairon et funèbre du tambour impose le silence à une foule émue qui retient son souffle. Ce silence est si vaste et profond que personne ne se croirait en présence d’un rassemblement de milliers d’individus.

L’homme à la blouse et au bonnet jaune descend de l’âne, soutenu par les prêtres et les frères de la Charité. Et là, au pied de l’estrade, il se fait lire la terrible sentence par un magistrat entouré de fonctionnaires, homme égal à lui, son frère. Presque traîné par ses derniers assistants, les prêtres et les frères de la Charité, il monte les escaliers jusqu’à l’estrade et s’assied sur le banc. Le bourreau, autre homme égal à lui, également son frère, attache ses pieds et ses mains au banc avec une corde, puis met son cou dans l’anneau. Un prêtre prononce alors le Je crois en Dieu, que celui que l’on sacrifie au nom de la loi répète jusqu’à atteindre le fils unique de la foi catholique, apostolique et romaine, et la manivelle, violemment secouée, ôte la vie à cet être. Le souffle de la foule comprimée éclate avec un écho pitoyable. Un prêtre redresse son corps, montre l’effigie du Christ depuis l’estrade de l’échafaud, et tout est fini. La loi est vengée et satisfaite face à un cadavre. Qu’est-ce que la loi a obtenu en violant le droit à la vie, fondement et garantie des autres droits de l’homme ?

Écoutez :

Le condamné à mort, jeté au fond de l’océan social, a été brisé par la lame de ses vagues. La mort l’a rendu insensible. Sur qui retombent les effets de la peine de mort ? Sur le supplicié ? Non, il est un cadavre, et un cadavre ne peut être l’objet d’une peine, car il n'a ni besoins ni passions à satisfaire. Qui subit alors les effets de la peine de mort ?

Le condamné laisse dans ce monde une famille innocente, cherchant partout et vainement le père qui était le pain de son âme et de son corps. Voulez-vous connaître les maux que la loi a infligés à cette famille innocente ? Elle lui a infligé des peines physiques et morales. Elle lui a pris pour toujours le soutien physique et spirituel qu’elle trouvait dans le père de famille. Voilà les effets de la peine de mort sur cette famille. Quelles sont les causes de tant de maux ? La peine de mort appliquée à un criminel. Mais pourquoi ce dernier a-t-il commis un crime ?

Ah ! Les lois des sociétés privilégiées dégoulinent de sang. Il n’y en a pas une qui ne pousse l’homme au délit et au crime. Dites, sinon, quelle loi ou quelle institution tire son fondement de la nature humaine ? Avec leurs règlements iniques, leurs contraintes criminelles et leurs gabelles infâmes, les lois des sociétés privilégiées rendent l’homme esclave de son ignorance et de sa misère. Savez-vous ce que sont l’ignorance et la misère ? Des vraies écoles de paresse, de mendicité, de prostitution, de vol, de meurtre et d’escroquerie. Ah ! Horrible et monstrueuse contradiction ! La loi crée le crime et, ensuite, elle le poursuit et le punit en assassinant l’être qui le commet. Veut-on encore plus d’iniquité ? La loi désire-t-elle encore quelque chose ? Elle a en outre un cadavre ; qu’elle le brûle et jette ses cendres au vent.

Mais écoutez davantage :

La loi préalablement imposée au condamné par la nature était de vivre, travailler, penser, croire, ressentir, vouloir, choisir, se réunir et s’associer librement avec ses frères pour atteindre les finalités rationnelles de la vie. Or, qu’a fait la loi qui devait respecter et garantir tous ces droits ?

Son intelligence, son cœur et sa volonté, crées pour penser, ressentir et vouloir, ces trois forces créatrices ont été stérilisées par le manque de moyens d’instruction et de travail. S’il n’a pu s’instruire pour nourrir son âme, s’il n’a pas pu travailler pour nourrir son corps et si, ignorant, misérable et obéissant à une force sociale contraire aux lois de la nature humaine, il a commis un crime, pourquoi l’échafaud ? Pourquoi la prison ? Que peuvent les sociétés du crime attendre d’autre que le crime même ?

La nature, qui a rendu sa conscience libre, aussi libre que le mouvement des étoiles qui tournent au firmament, fut dévoyée par la loi qui l’a empêché de connaître ses droits, ses devoirs et toute notion de bien. La loi a-t-elle fait quelque chose pour éclairer une conscience assombrie par les ténèbres sociales ? Quels moyens a-t-elle mis en place pour faciliter son libre exercice et son épanouissement ?

La loi a oublié que, s’il n’a pas une conscience libre, l’homme ne peut être libre dans aucune des différentes sphères de la vie, puisque les autres libertés ne sont que les diverses expressions par lesquelles la conscience se manifeste afin de réaliser les finalités de la vie qui, ensemble, constituent la finalité humaine. Elle a oublié que la liberté sociale ne doit pas être constamment menacée par de graves commotions, mais doit au contraire être renforcée par la liberté morale ou de conscience qui diffuse dans la société tout le bien ou le mal contenu en elle. Elle n’a pas voulu reconnaître que le désordre extérieur résulte du désordre intérieur, que le second est la cause du premier et, donc, que le fondement de toute réforme politique et sociale se situe à l’intérieur de l’homme, dans sa conscience. Qu’a fait alors la loi ? Quelles mesures a-t-elle prises pour favoriser la raison qui est chargée d’éclairer la conscience, en dirigeant et en encourageant la liberté et en établissant l’ordre et l’harmonie dans les agissements individuels et dans les relations sociales ? Elle a privilégié l’enseignement centralisé et perpétué ainsi l’ignorance et la misère. Et, si la loi a établi le principe du mal, pourquoi se plaint-elle de ses conséquences logiques et du désordre politique et social ?

 

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La Ilustración republicana federal, n°2, 25 juin 1871, p. 26

 

La loi a soumis à un châtiment afflictif la nature qui a rendu libre la manifestation de la pensée humaine sous toutes ses formes. Aux obstacles imposés par l’ignorance et la misère se sont ainsi ajoutés d’autres issus de lois pénales qui nient le progrès et protestent contre la civilisation. La loi l’a empêché de s’instruire, puis de manifester sa pensée. Elle tue d’abord la pensée humaine, puis prend toutes sortes de mesures pour l’empêcher de ressusciter. Qui peut envisager de telles iniquités ? N’est-on pas là en présence d’une Inquisition des temps modernes ? Les procès menés contre la liberté de pensée ne rappellent-ils pas les martyrs de Socrate, de Gutenberg et de Galilée ?

À sa condition physique était indispensable le droit d’association, du libre exercice duquel résultent les diverses associations humaines unies par la loi de solidarité qui contribue à leur développement et à leur harmonie. Quel respect ou, même, quelle considération la loi a-t-elle eu pour ce droit au nom duquel cet homme aurait pu, dans l’agriculture, les sciences et les arts, unir ses forces productives à celles de ses frères ? Elle a isolé ses forces intellectuelles, physiques et morales dans la sphère de son impuissance et, avec le prétexte inique de conspiration contre l’ordre public, elle lui a lacéré le visage avec le fouet ensanglanté des pouvoirs injustes et arbitraires. Au lieu d’éviter toute tentative révolutionnaire grâce au respect du droit d'association, la loi la légitime et la provoque : les révolutions des peuples ne sont en définitive que le résultat de l’exercice du droit de légitime défense contre les blessantes agressions des pouvoirs tyranniques qui mettent en péril leurs droits, leur liberté, leur dignité, leur honneur et leurs intérêts.

Un jour, instruit par ses frères d’aliénation politique et sociale, cet homme a voulu exercer son droit naturel de réunion afin de dénoncer les injustices commises contre ses libertés. Alors une loi dite de réunion, qui ébranle le fondement de l’édifice social et étouffe tout sentiment de fraternité et d’entente humaine, l’a envoyé dans un cachot avec son désir de liberté et son amour de l’héroïsme du martyre.

Souhaitant travailler, action pour laquelle la nature l’avait doué de forces intellectuelles, physiques et morales, cet homme a cherché partout et en vain des fonctions adaptées à ses aptitudes. Ses bras, suivant la loi de sa nature, ont voulu en vain s’exercer dans un travail qui lui fournirait la satisfaction des besoins essentiels de la vie. Poussé par la faim de sa femme et ses fils, il a constamment, mais inutilement frappé aux portes des ateliers. Personne n’a écouté ses plaintes. En trouvant la terre, la mer et les instruments du travail ainsi centralisés ; en trouvant l’industrie, l’enseignement, la religion, le commerce, la circulation et le crédit centralisés ; empêché d’exercer toutes ses facultés ; blessé dans ses droits ; déshérité de tous les biens de la terre ; ignorant, misérable et exaspéré par toutes sortes de violences ; cet homme s’est désespérément jeté dans les bras du crime. Il a alors chapardé, escroqué, volé et tué. En identifiant la loi comme son ennemi irréconciliable, il lui a déclaré la guerre à mort. Or, de cette lutte obstinée et inégale, c’est lui qui en est sorti vaincu.

La loi a alors proclamé sa victoire par une sentence de mort. Le condamné à mort, qui avait été écarté de la société par des agressions cruelles en tout genre, a gravi pas à pas l’échelle de l’échafaud. Et, devant la représentation de toutes les forces contre lui coalisées, devant le magistrat, le militaire et le prêtre, il offrit sa vie rendue insupportable par une société fondée sur l’inégalité des classes et des individus et sur les privilèges politiques, économiques, sociaux et religieux.

Qu’est-ce que la loi a alors gagné ?

Elle a, en multipliant les exécutions, provoqué l’augmentation du nombre des injustices pénales et la poursuite de la lutte féroce entre une société profondément désorganisée et ses propres passions, erreurs et maladresses.

Bref, au lieu de combattre les causes du crime, la loi combat ses effets. Au lieu d’abolir, elle propage le mal. La loi de la société contrarie la loi naturelle de l’homme et, dès lors, sa tendance naturelle à la réalisation du bien.

Le moment est venu de répéter la question qui fermait le chapitre précédent :

Comment l’homme pourra-t-il accomplir au mieux sa loi naturelle et réaliser ainsi son destin individuel et social ?

En veillant à ce que les lois et les Constitutions respectent et garantissent tous les droits naturels et individuels de l’homme. En veillant, en un mot, à ce que la société soit une image fidèle de l’homme, au lieu que l’homme soit à l’image d’une organisation sociale fondée sur les lois ou les institutions du privilège et de la centralisation.

C’est cela qu’exigent le droit, la morale et la justice.

 

III. La famille

L’homme désormais connu dans sa nature et dans les droits qui en dérivent, rien n’est plus simple que de comprendre sa conséquence : la famille est un être collectif formé par l’association libre et spontanée de l’homme et de la femme, association destinée à réaliser le bien dans une sphère plus large que la sphère individuelle, à savoir la sphère familiale.

Être fini, provisoire ou incomplet, l’homme tend alors naturellement à se compléter dans la famille.

L’homme est le principe de toute personne collective. Dès lors, les personnes collectives présentes dans la hiérarchie sociale doivent suivre le modèle de l’organisation humaine.

Si, comme le veut une loi de l’ordre universel qui régit tous les êtres de la création, les effets obéissent à la nature de leur cause, la famille et toutes les personnes supérieures qui la suivent dans l’ordre hiérarchique, comme la commune, la province ou l’État, doivent obéir à leur principe constitutif.

Quand, unis par le lien de l’association familiale, l’homme et la femme se voient reconnus tous les droits que la nature leur a accordés sans tenir compte de la différence entre les sexes, la famille tire alors les résultats bénéfiques de son libre exercice et développement : l’homme, la femme et leurs enfants sont heureux, vigoureux et énergiques.

La famille est la première société dans laquelle l’homme apparaît dans la vie. Or cette petite société, vivifiée par le vrai amour qui résulte de la sympathie entre les facultés intellectuelles, physiques et morales de l’homme et de la femme, est inviolable. Si un pouvoir viole son foyer, ce pouvoir commet une profanation, un attentat inique contre ce qu’il y a de plus sacré chez l’humain, l’inviolabilité du domicile. Les constitutions et lois des peuples doivent respecter et garantir absolument toutes les manifestations publiques et secrètes qui émanent de la constitution de la famille. Là où le foyer familial est violé, n’existent point la liberté, l’honneur, la dignité ni le respect du droit. Et, là où le droit n’est pas respecté ni existent la liberté, l’honneur et la dignité, la société humaine est impossible et seule est possible la société de la passion, de la vraie démagogie, de la démagogie gouvernementale.

Résultat : quand la famille est l’association libre et spontanée de deux individus, d’un homme et d’une femme aux droits recouvrés, la famille est heureuse, riche et forte. Mais, quand ce recouvrement des droits vient à manquer, la famille est malheureuse, ignorante et misérable. Car le résultat du désordre et du trouble provoqués chez l’individu par la restriction de ses droits naturels se répercute dans la famille. Étant le complément naturel et logique de l’homme, la famille devient alors l’une des causes qui l’affaiblissent et le ruinent le plus.

Voici l’ordre logiquement établi par la loi de la nature qui régit tous les êtres qui peuplent et composent l’univers.

 

IV. La commune

Si la famille est l’association libre et spontanée des individus, la commune est l’association libre et spontanée des familles.

Tout comme l’individu cherche à développer ses idées, ses sentiments, ses intérêts et ses aspirations dans la famille, les familles, en s’associant les unes aux autres, cherchent leur complément et leur garantie dans la commune, véritable incarnation de l’homme et de ses sentiments, de son intelligence et de sa volonté.

La commune est un petit royaume, un État, avec son pouvoir législatif appelé Assemblée municipale, son pouvoir judiciaire appelé Jury, et son exécutif appelé Mairie.

La loi de la variété dans l’unité, loi qui régit l’homme et la nature, gouverne aussi l’organisme municipal. La même variété qu’établissent chez l’homme ses facultés fondamentales – l’intelligence, le sentiment et la volonté –, suivant chacune son propre destin, se développant parallèlement et harmonieusement entre elles et formant ainsi l’unité supérieure qu’est l’esprit, cette même variété et cette même unité s’incarnent dans l’être municipal qui réunit : au sein du pouvoir législatif librement et directement élu, la somme des intelligences des citoyens de la commune ; au sein du pouvoir judiciaire, la somme de toutes les consciences ; et, au sein de l’exécutif, la somme de toutes les volontés. La variété des intelligences, des sentiments et des volontés des citoyens de la commune trouve ainsi son unité municipale par la voie du suffrage libre et direct.

Le développement intellectuel, moral et matériel d’une nation et de ses libertés, de ses droits, de ses intérêts et de son indépendance se jauge au développement intellectuel, moral et matériel de ses communes et de leurs libertés, de leurs droits, de leurs intérêts et de leur indépendance.

La province ou l’État ne peuvent pas tyranniser la commune. L’organisation municipale, la plus conforme à la nature humaine et à son destin providentiel, ne reconnaît que ses propres pouvoirs, librement et directement élus et donc révocables, contestables et responsables devant le peuple. Sa vie intérieure est sacrée : elle ne tolère que les liens naturels d’harmonie municipale et de relations extérieures.

Comment juger une loi qui prévoit l’élection censitaire des magistrats municipaux, qui soumet leur responsabilité non pas au peuple, mais à un gouverneur ou à une autorité étrangère à la vie municipale, qui intervient dans l’administration municipale et dans la détermination de ses intérêts, qui sanctionne ses actes et dispositions ou qui, en un mot, limite ou annule l’une des facultés essentielles de la commune ?

Cette loi est une violence, une tyrannie et une usurpation. Cette loi sème dans le peuple les graines du désordre et du déséquilibre municipal. Elle étouffe la liberté et avilit les consciences.

 

V. La province

Tout comme la municipalité est le fruit de l’association libre et spontanée des familles, la province résulte de l’association libre et spontanée de communes qui veulent s’assurer leurs droits, leurs libertés et leurs intérêts.

Tout comme la province dans de la vie municipale, l’État cantonal ne peut aucunement intervenir dans les affaires de la vie provinciale. La province est, comme la commune, la famille et l’homme d’où elle reçoit son organisation, un être autonome.

Tout comme le Conseil provincial sur la vie extérieure des communes, l’État cantonal ne peut légiférer que sur les relations extérieures des provinces librement et spontanément associées par leur communauté d’idées et d’intérêts. Toutefois, ni l’État cantonal ni le Conseil provincial n’ont respectivement le droit de légiférer sur la vie intérieure des provinces et des communes.

Comme la commune, la province a ses pouvoirs législatif, judiciaire et exécutif propres, respectivement représentés par l’Assemblée provinciale, le Jury provincial et le Conseil provincial. Ses magistrats, librement et directement élus, sont donc autant révocables, contestables et responsables que les magistrats municipaux.

 

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La Ilustración republicana federal, n°2, 25 juin 1871, p. 17

 

Les communes associées sont des organes de l’organisme provincial qu’elles forment. À l’image de l’organisme humain, où chaque organe indépendant se lie harmonieusement aux autres organes pour former l’Être qui est le modèle d’unité et d’harmonie de tous les organismes sociaux et de toutes les lois et institutions de la vie humaine, les communes sont à la fois indépendantes dans leurs sphères respectives et liées par la loi de solidarité qui donne force et vigueur à l’organisme provincial.

L’institution des gouverneurs n’a dès lors pas sa place dans la province qui, au contraire, ne reconnaît que son Conseil provincial comme pouvoir exécutif. Dans l’organisme de ce système libre, indépendant et décentralisé, il n’y a donc aucune place pour l’inévitable lutte entre le Conseil provincial, librement et directement élu, et le gouverneur, étranger aux coutumes, aux tendances et aux éléments constitutifs de la vie provinciale.

L’intervention de l’État cantonal dans les affaires intérieures de la province est une violation du droit qui perturbe la province et entrave le libre développement de ses intérêts intellectuels, moraux et matériels.

 

VI. L’état cantonal

L’association libre et spontanée des communes a formé la province, et l’association libre et spontanée des provinces, liées entre elles par la communauté de leurs intérêts, de leurs idées, de leur langue, de leurs coutumes, de leur législation et de la nature de leurs sols, forme l’État cantonal.

La loi d’indépendance et de solidarité régissant les organismes municipaux et provinciaux régit aussi l’organisme cantonal.

Tout comme la commune et la province, le canton possède ses pouvoirs législatif, judiciaire et exécutif : son Assemblée cantonale, son Jury cantonal, son Conseil cantonal.

Sa vie intérieure doit être sacrée pour l’État central ou Conseil fédéral. Ce dernier doit se limiter, d’une part, à respecter et faire respecter la Constitution démocratique républicaine fédérale de la Fédération Nationale et, d’autre part, assurer l’ordre et l’harmonie des relations entre les cantons, librement et spontanément unis par le lien fédéral.[2]

La seule condition que les cantons reconnaissent à leur association mutuelle, c’est la reconnaissance et l’assurance des droits individuels, objet sur lequel doit donc reposer le pacte fédéral.

 

VII. La Fédération Espagnole

Les cantons, librement et spontanément fédérés, comme les provinces, par la force de mêmes coutumes, d’un même dialecte et d’une identité de législation, par la sympathie du climat et par une communauté d’intérêts, forment ce que l’on appelle Fédération Espagnole.

Cette fédération a sa propre vie et, à l’instar de l’homme, de la famille, de la commune, de la province et du canton, elle est autonome. Elle se gouverne par les mêmes lois essentielles et constitutives.

Elle a, comme ces entités sociales, son pouvoir législatif, qui s’appelle Assemblée fédérale ; son pouvoir judiciaire, qui s’appelle Jury Suprême fédéral ; et son pouvoir exécutif, qui s’appelle Conseil fédéral espagnol.

Comme toutes les entités sociales qui la composent, la Fédération Espagnole est indépendante. Toute nation qui tenterait d’intervenir dans ses affaires intérieures commettrait la plus flagrante violation du droit public international.

La Fédération Espagnole tire sa splendeur, sa grandeur, son progrès, sa force et son énergie de l’ensemble des entités sociales dont elle provient. C’est cela qui donne force et énergie à l’unité nationale qui résulte non pas de la force, mais de la fédération libre et spontanée de tous les hommes, de toutes les familles, de toutes les communes, de toutes les provinces et de tous les cantons, toutes et tous animés par un objet et un but communs : l’épanouissement libre et spontané des facultés fondamentales et le bien-être intellectuel, moral et matériel de la Fédération Espagnole.

 

VIII. Mise en application de ce qui précède

La souveraineté nationale, résultat des souverainetés individuelles, ne doit pas promulguer des lois qui, d’une manière ou d’une autre, interrompent la réalisation du destin de l’homme par l’exercice de ses facultés fondamentales ou de ses droits naturels ou individuels. Elle doit édicter toutes les lois et les réformes sociales qui contribuent à développer et garantir de tels droits.

Si, comme cela a été dit au deuxième chapitre, les lois sont bonnes dès lors qu’elles épousent complètement l’homme, il devient indispensable que le peuple étudie d’abord l’homme et qu’il sache bien définir ses attributs essentiels ou, ce qui revient au même, ses droits naturels.

La première œuvre de la Constitution d’un peuple libre et conscient de ses droits et devoirs, c’est la déclaration des droits de l’homme et la garantie de leur libre exercice, sans aucune entrave ni réglementation. Car ces droits sont aussi absolus que les facultés de la nature humaine dont ils découlent.

Une fois assurées à l’homme toutes les conditions indispensables à l’exercice de ses droits naturels, une fois donc son autonomie consacrée par la Constitution démocratique républicaine fédérale espagnole, l’ordre logique établi par la nature exige que soient également consacrées l’autonomie et l’indépendance de la famille, autre entité sociale composée d’individus autonomes. Une fois garantie l’autonomie de la famille, doit être consacrée l’autonomie municipale que compose l’association libre de familles autonomes et indépendantes. Les communes indépendantes, dont l’association forme la province comme les provinces librement associées composent le canton, doivent aussi être assurées de leurs autonomies respectives et de leurs droits respectifs. Le complément d’une Constitution véritablement républicaine, démocratique et fédérale réside dans des cantons librement et spontanément associés dans une fédération espagnole qui ne leur fasse pas perdre et même qui leur assure leur indépendance respective.

La République démocratique garantit l’autonomie individuelle, et le principe fédératif garantit l’indépendance des diverses entités sociales. La démocratie ne pouvant vivre que dans une organisation fédérative, c’est-à-dire dans l’organisation naturelle des peuples, les droits naturels de l’homme ne peuvent se traduire en lois pratiques que dans la forme républicaine fédérale de gouvernement.

Mais cela répond-il à tous les désirs et aspirations du peuple espagnol ?

 

IX. La réforme sociale

Dans les conditions où se trouve l’Espagne à cause de la centralisation politique, économique, sociale et religieuse qui pèse sur elle depuis des siècles, l’établissement de la République démocratique fédérale est devenu une nécessité pressante.

Nous sommes tombés dans un précipice dont le fond est un abîme d’où seule la République démocratique fédérale peut nous sortir.

Le salut du peuple est la République démocratique fédérale avec tous ses principes et toutes ses conséquences naturelles logiques.

Il est, pour l’établir, indispensable d’envisager préalablement un plan de réformes sociales qui ouvrent la voie à l’émancipation politique et sociale du peuple.

Les réformes les plus urgentes, que nous soumettons au parti républicain fédéral, ont déjà été avancées dans un supplément de La Democracia Republicana qui, le 2 octobre 1869, a valu à l’auteur de ces lignes un procès animé.

Voici ces réformes :

« Abolition de la peine de mort.

« Abolition du tirage au sort, et congé absolu pour les rangs de caporal et de sergent dans l’armée.

« Création, sur la base de l’enrôlement populaire, d’autant de corps d’armée que d’États fédéraux.

« Transfert, après examen des états de service, des actuels généraux, chefs, officiers et sergents dans l’armée républicaine.

« Une échelle rigoureuse pour les places et les promotions.

« Abrogation de l’ordonnance militaire.

« Suppression des registres des bagnes et des prisons, et création d’un système pénitentiaire.

« Établissement immédiat du cadastre ou d’une statistique territoriale qui découvre la propriété légitime et la propriété illégitime.

« Développement, pour cause d’utilité publique et jusqu’où le droit et les nécessités du prolétariat le conseillent, du principe de nationalisation et d’expropriation, en priorité des biens de la nation, de l’Église et de l’ancienne couronne.

« Abolition des classes passives.

« Abolition des charges de justice.

« Abolition de toutes sortes de recensements perpétuels.

« Séparation intégrale de l’Église et de l’État.

« Restitution de tous les objets gagés.

« Abolition des octrois et des droits de passage.

« Une seule et unique contribution proportionnelle sur le capital.

« Unification de la dette publique.

« Des codes civil et pénal respectueux des droits de l’homme.

« Abolition de l’esclavage.

« Un nouveau système d’enseignement et d’instruction publique qui embrasse entièrement l’homme.

« Toutes les réformes sociales indispensables à l’extinction de l’ignorance et de la misère du peuple. »

Ces réformes engagées, la liberté individuelle deviendra une vérité et les droits de l’homme seront garantis. L’homme marchera vers la réalisation du bien sur une voie désormais débarrassée de révolutions et d’émeutes. L’exploitation de l’homme par l’homme prendra fin et l’égalité économique et sociale entre les classes et les individus constituera la plus solide garantie de l’égalité politique.

Concluons :

Le Salut du peuple est la République démocratique fédérale avec tous ses principes et toutes ses conséquences naturelles, logiques et destinées à effacer à jamais du front de l’homme les stigmates d'exclusion sociale que représentent l’ignorance et la misère, causes de paresse, de mendicité et de crime.

Francisco Córdova y López

 


[1] François Cantagrel, Comment les dogmes commencent : symbole proposé à la démocratie, Bruxelles, 1857, p. 4. Sur François Cantagrel (Amboise 1810 – Paris 1887), fouriériste, exilé en Angleterre, au Texas et en Suisse entre 1849 et 1859, député du Loir-et-Cher en 1849 et de Paris de 1876 à sa mort, voir ses notices dans le DHS, dans le MAITRON et, surtout, dans le Dictionnaire biographique du fouriérisme.

[2] Cette Constitution, restée en 1873 seulement à l’état de projet principalement rédigé par Emilio Castelar, s’oppose à la Constitution approuvée en juin 1869 par des Cortès constituantes majoritairement monarchistes et, notamment, à son article 33 : « La forme de gouvernement de la Nation espagnole est la monarchie ».

 


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Francisco C¢rdova y L¢pez, Le Salut du Peuple, Ou la R‚publique d‚mocratique...


Pour citer ce document

Francisco Córdova y López, Le Salut du Peuple, ou la République démocratique fédérale, [Madrid, 1871], présenté par Hernán Rodríguez Vargas et traduit par Alexandre Frondizi, dans Olivier Christin et Alexandre Frondizi (dir.), Bibliothèque numérique du projet Républicanismes méridionaux, UniNe/FNS, 2 octobre 2020, URL : https://unine.ch/republicanism/home/bibnum/catechismes/2.html