Communiqué

Conservation des automates anciens : le dilemme

05 septembre 2012

Vedettes de l’exposition Automates et Merveilles qui se tient actuellement dans trois musées neuchâtelois, les androïdes Jaquet-Droz posent un dilemme aux conservateurs: faut-il les montrer régulièrement en état de marche au public, avec le risque d’accélérer leur usure ? Ou, au contraire, les taire à jamais, afin de préserver leur aspect originel ? Sous l’impulsion de l’Institut d'histoire de l'art et de muséologie de l’UniNE, un colloque international ouvert au public se penchera sur la problématique que suscite la conservation des objets animés. L’événement aura lieu les 6 et 7 septembre au Musée d’art et d’histoire de Neuchâtel, puis le 8 septembre au Musée international de l’Horlogerie à la Chaux-de-Fonds.

« Nous sommes en présence d’enjeux historiques, culturels et techniques qui touchent aux fondements mêmes de la conservation muséale », observe le co-organisateur de l’événement Pierre-Alain Mariaux, professeur d’histoire de l’art et de muséologie. Le phénomène concerne d’ailleurs tous les objets animés aux mécaniques fragiles, comme les boîtes et les instruments de musique.

Une vingtaine de spécialistes du monde entier débattront de la question, non sans avoir au préalable retracé, au fil de leurs exposés respectifs, la longue histoire des automates qui va de l’Antiquité à nos jours. « L’approche imposait un regard polymorphe », relève Pierre-Alain Mariaux. Se succéderont ainsi à la tribune des historiens, des historiens de l’art, de la littérature, des musicologues, des spécialistes de la conservation, des praticiens et des théoriciens de la restauration d’objets.

« Parmi les premiers objets que l’on peut considérer comme précurseurs des automates, il y a l’œuvre d’Héron d’Alexandrie, indique le professeur. Cet ingénieur, mécanicien et mathématicien grec du 1er siècle après J.-C., est notamment connu pour ses machines hydrauliques. Il avait entre autres conçu une fontaine animée qui faisait chanter des oiseaux au moyen d’un filet d’air chassé par l’eau qui s’écoulait dans un bassin. L’eau descendait dans un seau maintenu en position grâce à un système de contrepoids. Une fois le bassin supérieur vidé, les oiseaux se taisaient, tandis que le récipient inférieur basculait et actionnait au même moment une chouette qui se tournait vers les oiseaux siffleurs : l’illusion était parfaite, on avait l’impression que c’était le rapace qui réduisait les oiseaux au silence. Une fois le seau vidé, le mécanisme se remettait en place et les oiseaux recommençaient à siffler. »

Lors de sa conférence, le spécialiste de l’art médiéval qu’est Pierre-Alain Mariaux évoquera des mécaniques de cette époque. «  Au Moyen Age, c’est d’abord d’Orient que proviennent les découvertes les plus significatives, toujours dans le domaine des machine hydrauliques, à l’exemple de la pompe à eau d’Al Djazari ». Cet inventeur arabe vécut à la charnière du 12e et du 13e siècle. Il est l’auteur du livre de la connaissance des procédés mécaniques paru en 1206 et dont un exemplaire est conservé à Istanbul. On a longtemps cru que la plus impressionnante de ses inventions, un système de pompage d’eau sophistiqué, n’était que l’œuvre de son imagination. Or, une roue à eau fonctionnant selon les principes d’Al Djazari a récemment été retrouvée à Damas en Syrie. Construite au 13e siècle, la pompe a fonctionné pendant 700 ans, alimentant même un hôpital de quartier jusqu’en 1970. Belle preuve de longévité du matériel de l’époque ! D’ailleurs, certains procédés de pompage hydraulique décrits par le grand homme sont encore d’actualité aujourd’hui.

Enfin, une conférence grand public de Jean-Claude Heudin, directeur de Institut de l’Internet et du Multimédia à Paris, donnera une touche contemporaine à l’événement. Cet informaticien de haut vol fera le point sur l’intelligence artificielle (IA). Souvent dépeinte « comme une créature belliqueuse capable d’apprendre et d’évoluer par elle-même », l’IA affronte dans les laboratoires une réalité bien plus laborieuse que ne manquera pas de rappeler le conférencier dans son exposé de vendredi.

Le communiqué au format pdf
 

Contact :

Rossella Baldi
Institut d'histoire de l'art et de muséologie
Tél. : +41 32 718 19 30
rossella.baldi@unine.ch

Prof. Pierre-Alain Mariaux
Institut d'histoire de l'art et de muséologie
Tél. : +41 32 718 18 74
pierre-alain.mariaux@unine.ch

En savoir plus :

Programme du colloque

Exposition Automates et Merveilles
jusqu’au 30 septembre 2012
automatesetmerveilles.ch