Par zone alluviale on entend une plaine inondable le long d’un ruisseau ou d’une rivière qui présente des niveaux d’eau variable. De part les crues et la dynamique des ruisseaux et des rivières, de nouveaux habitats sont constamment créés. Les zones de végétation ou de forêt sont recouvertes de sable, de gravier ou de débris, ce qui détruit complétement ou en partie seulement la végétation existante. Déplacé par les crues, le bois mort peut s’accumuler en grand tas. Ces sites sont d’une grande importance pour les reptiles. Ils offrent au fil des ans d’excellents habitats structurés, ensoleillés et appropriés pour la ponte des oeufs. Ces zones de débris et de sédiments deviennent particulièrement attractives après quelques années, lorsque de la végétation et quelques buissons s’y seront installés, procurant ainsi une couverture supplémentaire ; en effet, ces zones sont trop nues au début pour être totalement favorables.
Au cours de leur évolution naturelle, ces milieux vont progressivement se reboiser et perdre ainsi leur attrait pour les reptiles. Mais de nouveaux habitats sont constamment produits par les crues. Les surfaces d’éboulis proches du lit de la rivière, lesquelles sont soumises à la dynamique de la rivière, ne sont colonisées que par des reptiles semi-aquatiques. Par exemple, dans les vallées fluviales du Tessin, on trouve l’ensemble des reptiles présents au sud des Alpes.
En raison des nombreuses canalisations de cours d’eau en Suisse, ces milieux sont devenus rares, en particulier sur le Plateau, et ils ne sont alors plus soumis à la dynamique de l’eau. Mais certaines constructions plus en faveur de l’environnement au bord des cours d’eau peuvent être utiles à plusieurs espèces de reptiles, en particulier les couleuvres aquatiques et semi-aquatiques ; les murs en pierre sèche, les gabions et les constructions en bloc de pierre en sont d’excellents exemples.
Les zones alluviales offrent également de précieux habitats pour les amphibiens, car divers étangs et gouilles s’y forment. Dans le cours d’eau naturel du Tagliamento, au nord-ouest des Alpes italiennes, une étude a dénombré un étang par hectare. Les inondations récurrentes permettent de chasser les prédateurs potentiels de ces étangs. Si les flaques restantes sont relativement grosses et peu profondes, ces conditions sont souvent idéales pour le développement des différentes espèces d’amphibiens. Le bois mort induit des courants différents, favorisant ainsi la création de cuvettes et dépressions qui deviendront de futurs nouveaux points d’eaux.
Les zones alluviales qui ne sont plus régulièrement soumises à des crues sont caractérisées par des sols graveleux, sableux ou localement limoneux. Ces zones s’assèchent rapidement, alors que le niveau de la nappe phréatique varie de manières saisonnières, mais reste souvent élevé. Dans les forêts alluviales, on trouve des anciens bras du lit principal, d’anciens méandres qui se sont asséchés. Ces anciens bras ont des caractéristiques bien différentes que les gouilles et les étangs présents dans la partie active de la zone alluviale. Ils ne se trouvent plus dans la zone perturbée du lit principal et ne sont par conséquent plus inondés et décapés régulièrement. Ces milieux abritent une grande diversité de plantes. Dans les Alpes, et particulièrement dans les larges contrées alpines, les anciens bras au-dessus du niveau de la nappe phréatique sont encore fortement influencés par le niveau d’eau du bras principal. En hiver, les précipitations tombent sous forme de neige, ce qui induit un faible niveau d’eau dans les rivières et beaucoup de bras latéraux s’assèchent. En avril ou mai, la fonte des neiges alimente en premier lieu le cours d’eau principal, puis les bras latéraux se remplissent juste à temps pour la ponte des amphibiens.
Les eaux en dehors des zones régulièrement inondées sont habituellement dépourvues de poissons. Ces zones offrent également un approvisionnement alimentaire très riche et la qualité de l’eau est supérieure à la moyenne. En conséquence, on trouve dans ces zones toutes les espèces indigènes d’amphibiens, et parfois avec de grands effectifs. En plus d’un habitat aquatique optimal, les zones alluviales offrent d’autres grandes qualités, tels que des habitats terrestres humides offrant une nourriture très abondante.