Communiqué
Les arbres réagissent moins au réchauffement climatique que par le passé
23 septembre 2015
Des observations réalisées sur plus de trente ans dans différents pays européens montrent qu’il existe une limite dans l’apparition précoce des feuilles sur les arbres en réponse au réchauffement climatique. Ce résultat ressort d’une étude internationale, publiée aujourd’hui dans la prestigieuse revue Nature et à laquelle a participé un chercheur de l’Université de Neuchâtel et de l’Institut WSL pour l'étude de la neige et des avalanches SLF. Il ne s’agit toutefois pas d’une véritable adaptation au réchauffement global, nuancent les chercheurs, car des hivers trop doux peuvent à la longue entraîner des problèmes graves de développement chez les végétaux de climats tempérés.
La relation entre la température moyenne d’un printemps et la date de sortie des premières feuilles des arbres est connue depuis longtemps. «En général, chaque degré ajouté à la température moyenne entre février et avril entraîne, selon les espèces, une avance de 2 à 6 jours dans l’apparition des feuilles», indique Yann Vitasse, post-doctorant à l’Institut de géographie de l’Université de Neuchâtel et au SLF.
Les chercheurs, dont Yann Vitasse, ont voulu savoir comment cette relation a évolué au cours des trente dernières années durant lesquelles le climat s’est fortement réchauffé. Ils ont pour cela analysé les observations de sortie des feuilles de sept espèces d’arbres européens (aulne, bouleau, marronnier, hêtre, tilleul, chêne et frêne) sur plus de 1200 sites, tout en s’appuyant sur des modèles intégrant des processus physiologiques. Il ressort de leurs analyses que les feuilles sont apparues en moyenne avec 4 jours d’avance par degré entre 1980 et 1994, contre seulement 2,3 jours d’avance par degré entre 1999 et 2013, soit une diminution de plus de 40%.
Une partie de l’explication est imputable à des effets sur la dormance, un état où les bourgeons des arbres se mettent au repos dès l’automne. La levée de la dormance est provoquée par une période de froid qui doit être suffisamment importante. Or si la température ambiante devient chaude au cours de l’hiver, la levée de la dormance ne devient que partielle et l’arbre a finalement besoin de plus de chaleur pour «forcer» son développement. Il doit donc attendre plus longtemps avant de pouvoir déployer ses feuilles.
Un autre facteur cependant contribue à contrer l’apparition trop précoce des feuilles : c’est la durée du jour, que les spécialistes nomment «photopériode». En effet, si la température invite à avancer la date de feuillaison, la plante s’expose à une durée de jour plus courte qu’attendue, ce qui a pour conséquence de retarder l’apparition des feuilles. Ce mécanisme est également une protection supplémentaire contre les gels tardifs.
«Nos résultats ne signifient toutefois pas que les arbres s’adaptent au réchauffement global, avertit le chercheur. Un manque de froid répété durant les hivers empêcherait des levées efficaces de dormance, entraînant des problèmes graves de développement pour les plantes en général».
Contact :
Dr Yann Vitasse
Chaire de climatologie appliquée
Tél. +41 32 718 16 37
yann.vitasse@unine.ch