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État de la recherche et perspectives

Le Journal helvétique n'a fait l'objet que d'un nombre limité de travaux, souvent partiels ou déjà anciens. Une partie de ces études présente, à la suite de Gonzague de Reynold, le Journal helvétique comme le principal organe de promotion de l'helvétisme, entendu comme l'expression du patriotisme de l'époque. Or ce point de vue mérite aujourd'hui un réexamen. En effet, les principaux rédacteurs du Journal helvétique - et notamment son fondateur Louis Bourguet - sont moins les chantres d'un sentiment national que des savants cosmopolites intégrés dans les réseaux d'une République des lettres qui transcende les territoires nationaux.

En dehors de cette approche helvétiste, le journal a souvent été déconsidéré, son contenu paraissant trop médiocre pour susciter de l'intérêt. Un tel point de vue doit sans doute beaucoup aux critiques que le journal essuie, dès le XVIIIe siècle, de la part d'écrivains influents. Jean-Rodolphe Sinner de Ballaigues, l'auteur d'un Voyage historique et littéraire en Suisse occidentale, reproche au Journal helvétique ses mauvais jeux d'esprit qui, dans chaque livraison, paraissent sous la forme d'énigmes ou de logogriphes. Jean-Jacques Rousseau, quant à lui, regrette dans ses Lettres écrites de la montagne qu'on trouve la critique de ses ouvrages dans « le fumier du Mercure de Neuchâtel ». À leur suite, Philippe Godet et Virgile Rossel considèrent que les pièces en vers proposées par le périodique pendant toute la durée de son existence sont irrémédiablement mauvaises, en dehors d'une poignée d'exceptions. Ces points de vue dépréciatifs seront persistants.

Cependant, depuis une trentaine d'années, le Journal helvétique est l'objet de quelques études ponctuelles et ciblées de la part d'historiens comme Jean-Daniel Candaux et Michel Schlup, et de littéraires comme Rodolphe Zellweger ou Alain Cernuschi, qui mettent en évidence la richesse d'une telle source et la diversité de ses exploitations possibles.

Il reste à porter un regard d'ensemble sur le périodique pour comprendre, dans toute sa complexité, son double rôle de vecteur et acteur culturels à travers ses cinquante années d'existence. Pour ce faire, nous privilégierons une approche interdisciplinaire, qui alliera une étude structurelle du Journal helvétique et une réflexion sur son intertion dans le maillage européen des publications périodiques. Notre recherche associera les efforts de deux doctorants, l'un littéraire et l'autre historien. Elle tirera profit de divers fonds d'archives encore partiellement sous-exploités, comme ceux de Louis Bourguet, d'Henri-David Chaillet et de la Société typographique de Neuchâtel, tous trois conservés à la Bibliothèque publique et universitaire de Neuchâtel. Enfin, dans le cadre de l'école doctorale « La Suisse dans les Lumières européennes », nous maintiendrons un dialogue avec des chercheurs des universités de Lausanne, Genève et Berne, qui consacrent leurs travaux aux Lumières helvétiques.